Un peu d'histoire : En 1686, Vauban publie anonymement une " Methode generalle (sic) et facile pour faire le denombrement des peuples ". Cette brochure anonyme (et sans autorisation) de 15 pages dont il ne subsiste que 2 exemplaires avait pour but de donner une méthode aux Intendants pour qu'ils fassent ce grand inventaire de la France (effectué à partir de 1696 jusqu'en 1698). Vauban se servira de ces données pour son essai sur la " dîme royale " qui sortira en 1698. Réformer l'assiette fiscale pour mieux faire entrer l'argent, le problème est éternel ! Il fallait pour cela bien connaître son pays et c'est à ce travail qu'il s'est attelé : " La vie errante que je mène depuis 40 ans et plus, m'ayant donné occasion de voir et de visiter plusieurs fois, et de plusieurs façons, la grande partie des Provinces de ce Royaume, tantôt seul, tantôt avec mes domestiques, et tantôt en compagnie de quelques ingénieurs : j'ay souvent eu l'occasion de donner carrière à mes réflexions, et de remarquer le bon et le mauvais des Païs ; d'en examiner l'état et la situation, et celuy des Peuples ". Homme de terrain donc qui veut se doter d'outils fiables et qui ne sera (évidemment) pas écouté car il voulait supprimer la dîme, impôt injuste pour imposer tout revenu au 1/15e ! On croit rêver
DESCRIPTIF : Un volume in-folio (35 cm x 23 cm x 8 cm) relié, pleine basane brun d'époque, dos orné de 6 nerfs, d'une pièce de titre
(MEMOIRE / DV / LANGVEDOC)
et de 6 caissons dorés à décor floral, tranches
mouchetées rouges, tranchefiles, papier de garde marbré,
4 pages blanches +
5 planches de statistiques dont 4 dépliantes (concernant
les Etats du Languedoc et le premier manuscrit)
+ 21ff blancs
suivi de
Mémoire sur la province de
Languedoc, 283ff + 30ff blancs
Suivi de 3 autres mémoires sur :
Lyon, 176ff + 31 ff blancs
Dauphiné, 194ff + 27ff blancs
Provence, 158ff + 58ff blancs
Total : 1956 pages dont 334 pages blanches
Etat de la reliure :
Reliure pleine basane d'époque un peu usée et frottée
avec quelques très petits manques de cuir en surface de
la peau qui est très épaisse ; accroc à la
coiffe supérieur avec manque, charnière supérieure
légèrement fendue ; angle inférieur droit
de la pièce de titre manquant (OC). Coins émoussés
avec un manque important à un coin inférieur. Coupes
avec manques. Nonobstant belle reliure d'époque.
Etat du manuscrit proprement dit : Magnifiquement écrit
par une main d'époque, avec un soin et un sens esthétique
marqué, sur un superbe papier vergé, assez fort,
le document est dans un état exceptionnel. Le papier ne
comporte pratiquement pas de rousseurs sauf sur les premières
pages de garde et les planches dépliantes mises en tête
du manuscrit. Environ 23 à 25 lignes par pages. Une page
blanche en fin de livre manquante à moitié.
1. (Nicolas de LAMOIGNON
DE BASVILLE). MEMOIRE sur la province de LANGUEDOC
(283ff + 30ff blancs).
A- L'AUTEUR : Cinquième fils du premier président
Guillaume de Lamoignon, Nicolas de Lamoignon de Basville, après
avoir reçu une formation scientifique des jésuites
du célèbre collège parisien de Clermont,
commença par exercer la profession d'avocat au Parlement
de Paris où il entra dès l'âge de 18 ans,
en 1666. Puis, après avoir occupé diverses fonctions,
il s'orienta vers la carrière administrative et devint
un des grands commis de l'Etat dont Louis XIV suivit le travail
avec intérêt. D'abord nommé intendant de Poitiers
en 1682, il quitta ce poste en 1685 pour rejoindre l'intendance
du Languedoc qu'il dirigea d'une main de fer, se montrant l'exécuteur
zélé du roi dans la mission de " catholicisation
" forcée des protestants. Avec l'aide d'une trentaine
de subdélégués, il se trouvait maintenant,
à l'âge de 37 ans, à la tête d'une province
immense, divisée en deux généralités
(celle de Montpellier et celle de Toulouse) et composée
de 23 diocèses !
Installé à Montpellier
en 1685, il y restera durant plus de 33 ans (jusqu'en 1718).
b- L'OUVRAGE :
SA DATATION : C'est durant son séjour montpelliérain
que Lamoignon de Basville rédigea son Mémoire concernant
la province de Languedoc. Peut-être le commença-t-il
vers 1696-97, si l'on se fie à ce que les historiens ont
régulièrement affirmé en donnant ces dates
comme époque de sa rédaction. Quelques-uns des manuscrits
conservés de cet ouvrage portent d'ailleurs la date du
31 décembre 1697, ce qui pourrait confirmer la datation
des chercheurs ; mais ces exemplaires sont moins épais,
moins complets et correspondent visiblement à un premier
état du mémoire que Basville aurait pu vouloir faire
circuler dans son administration, sans doute en vue d'obtenir
des compléments d'informations de ses subalternes locaux.
En effet, il est évident qu'il le termina un peu plus tard,
en 1698 (voire en 1699), comme il en apporte lui-même la
preuve écrite, au moins dans le passage suivant (datation
relative) de son avertissement, type de texte préliminaire
qu'on écrit généralement après avoir
terminé un ouvrage : " Je croy pouvoir renfermer toutes
les questions qui m'ont esté faites sur la Province de
Languedoc où j'ai l'honneur d'estre Intendant depuis treise
ans [
] " (notre manuscrit, p. 1) ; et, surtout, plus
loin (notre manuscrit, p. 354-355), avec une datation plus précise,
dans un tableau qui lui permet de faire l' " Estat de Ce
que le Roy à [sic] retiré du Languedoc depuis le
Premier Janvier 1689, Commancement [sic] de la guerre, jusques
en 1698 ". On notera que la double date de 1697-1698 apparaît
justement sur quelques exemplaires conservés.
UNE COMMANDE ROYALE : En fait, ce gros ouvrage comme les autres
n'était pas né d'une initiative de l'intendant Basville.
Il avait été écrit sur ordre de Louis XIV
pour servir à l'éducation de Louis duc de Bourgogne
(1682-1712), petit-fils du roi et fils aîné du Grand
Dauphin, qui deviendra Dauphin à son tour, à la
mort de son père en 1711. Adolescent à l'époque
de la rédaction du Mémoire sur le Languedoc, ce
prince avait pour gouverneur, depuis 1689, le duc Paul de Beauvillier
(1648-1714) - gendre de Colbert (1619-1683) et un des proches
collaborateurs de Louis XIV à la tête de l'Etat (chef
du Conseil des Finances depuis 1685, membre du Conseil d'en haut
avec le titre de ministre d'Etat à partir de 1691) - ;
c'est ce gouverneur qui avait défini un questionnaire précis
auquel Basville avait dû répondre par les développements
de son livre. Il convient de rappeler que c'était ce duc
de Bourgogne qui avait également Fénelon pour précepteur
(lequel était un grand ami de Beauvillier), mais qui mourut
avant son grand-père, laissant un seul fils survivant,
le futur Louis XV.
c-LE TRAVAIL DE BASVILLE, SA RICHESSE ET SON ORIGINALITE : Le
Mémoire de Basville n'est pas un simple " pensum "
pour cet intendant méticuleux qui a laissé le souvenir
d'un homme à la répression féroce dans sa
lutte contre les protestants du Languedoc. Il se met à
la tâche avec zèle et avec un certain talent, nous
laissant ainsi un ouvrage du plus haut intérêt historique.
Il nous apporte une documentation exceptionnellement riche d'informations
(parfois introuvables ailleurs) et agréablement écrite.
Son livre est le fruit du travail d'un homme cultivé et
intelligent qui, avec sa compétence de juriste et d'administrateur,
donne une vision affinée de l'histoire du Languedoc telle
qu'on la connaissait sous Louis XIV et telle qu'elle pouvait apparaître
utile dans le quotidien des hommes du temps, en particulier des
serviteurs du roi. Mais surtout, ce grand commis de l'Etat, grâce
à son expérience, y expose tout ce qui fait le particularisme
de la province à travers ses richesses naturelles, humaines
et économiques. Soucieux du détail précis
et révélateur sur lequel il base toujours son argumentaire,
il aborde ainsi la démographie, évoquant les classes
sociales languedociennes (les " Etats " comme on disait
alors et leurs sous-divisions) qui composent chaque diocèse,
mais aussi la répartition religieuse de la population,
en particulier en ce qui concerne la question du protestantisme
qu'il connaît bien. Les structures administratives et judiciaires
ou institutions, laïques aussi bien que religieuses, au niveau
provincial et plus local, sont exposées de manière
bien précise dans son livre, à la lumière
du droit en vigueur (et de son histoire) dans les terres languedociennes
; l'intendant ne manque pas de désigner les divers responsables
en poste, au moment où il écrit. Ces multiples aspects
finissent au fil des pages par brosser un portrait politique,
juridique et institutionnel très précis et bien
vivant de la province, tout en faisant parallèlement ressortir
petit à petit les droits du roi en Languedoc. L'auteur
termine son livre par un état long et détaillé
du commerce, de " l'industrie " (pour parler à
la moderne) et des productions en général de la
province, tout en évoquant les ouvrages ou travaux qui
sont faits et ceux qui restent à faire pour l'amélioration
de la situation languedocienne. Il a bien sûr en vue, en
permanence, les intérêts du roi dont il note par
le menu les montants des revenus provinciaux, qu'ils soient fiscaux
ou domaniaux. C'est dans ce domaine des chiffres que Basville
se montre un esprit d'avant-garde : il le connaît parfaitement
et le maîtrise magnifiquement ; aussi, son ouvrage fourmille-t-il
de données chiffrées et de tableaux statistiques
de facture moderne, à double entrée (verticale et
horizontale), ce qui est très novateur à l'époque.
Bien qu'il ait produit un livre bien construit, un mémoire
bien structuré, l'auteur répond ainsi, au fil des
pages, sous une forme chiffrée on ne peut plus précise,
aux diverses questions posées par le duc de Beauvillier,
gouverneur de l'éducation du duc de Bourgogne, lequel,
par ses fonctions d'homme d'Etat, connaissait bien les données
chiffrées du royaume et était à même
d'apprécier le travail statistique affiné de l'intendant
sur la province qu'il dirigeait. Ce faisant, Basville a rédigé
là un document complet et incontournable sur le Languedoc
de la fin du XVIIe siècle.
NOTES SUR LES COPIES ORIGINALES QUE BASVILLE FIT REALISER : REMARQUES
SUR L'ENSEMBLE DES EXEMPLAIRES CONSERVES ET LOCALISES, COMPARATIVEMENT
AU NÔTRE : Les historiens ont écrit que, si l'ouvrage
de Basville n'avait été publié qu'en 1734,
soit dix ans après la mort de l'auteur, il avait en revanche
circulé immédiatement diverses copies du Mémoire.
L'imaginaire des chercheurs donne l'impression d'avoir beaucoup
" travaillé " à ce sujet, sans qu'une
réflexion approfondie leur ait permis d'analyser clairement
les hypothèses de ce que pouvait et avait certainement
pu vouloir faire l'intendant. Il paraît probable que Basville
ait communiqué des copies à certains de ses subalternes,
en vue d'obtenir des informations complémentaires qui devaient
lui permettre de mettre la dernière main à son mémoire,
avant de l'adresser au roi. Dans l'inventaire exhaustif des 84
manuscrits connus et localisés du Mémoire que Françoise
Moreil publie dans la thèse qu'elle a consacrée
à cet ouvrage, cette historienne précise justement
que certains ne sont que des brouillons qui ont pu servir à
Basville ou être corrigés par lui. Cela nous explique
déjà l'existence d'un certain nombre de manuscrits
conservés qui sont souvent moins épais et moins
complets que la plupart des autres. Françoise Moreil nous
fait effectivement découvrir que certains exemplaires comportent
des lacunes plus ou moins importantes ou même ne possèdent
pas quelques-unes des parties de l'ouvrage. Il est, par ailleurs,
évident que certains des manuscrits, sur lesquels elle
ne fournit guère d'informations, ont trop peu de pages
pour être complets. Mais il n'est pas certain que tous ces
exemplaires " partiels " datent bien du XVIIe siècle
En effet, F. Moreil nous révèle que 30 manuscrits
ne datent que du XVIIIe siècle
Cette historienne
sait d'ailleurs, par une précision manuscrite figurant
sur un exemplaire qui lui appartient, que, profitant sans doute
de certaines de leurs relations, " plusieurs personnes prirent
des copies de ce qui avoit été écrit "
(cf. réf. Moreil, p. 34). Mais, les 54 autres manuscrits
ne sont pas tous datés par elle
Donc, combien y en
a-t-il vraiment du XVIIe siècle ? Actuellement, nous ne
le savons pas, mais si l'on retranche tous les brouillons ou versions
incomplètes, il reste seulement un tout petit nombre d'exemplaires
remarquables parmi ces 54 documents. Déjà, F. Moreil
nous apprend que, sur l'ensemble des 84 manuscrits (les originaux
du XVIIe siècle + les copies " pirates " du XVIIIe),
seuls 53 comportent des tableaux statistiques. Or, peu de manuscrits
en ont beaucoup, la plupart n'en présentant que quelques-uns,
voire un ou deux
Selon F. Moreil, le nombre maximal de tableaux
recueillis sur l'ensemble des manuscrits est de 11.
Or, la première partie du manuscrit concernant le Languedoc,
très exceptionnellement, en contient 5 ! Rien que par ce
fait, il est unique.
Où Basville pouvait-il faire circuler des copies ? En fait,
répondant à un ordre du roi, Lamoignon de Basville
ne pouvait se permettre, une fois son travail achevé, d'envisager
la publication de son livre. Il se devait d'en réserver
la primeur au roi lui-même, au duc de Bourgogne, à
son père le Grand Dauphin et à son gouverneur le
duc de Beauvillier, ainsi que, peut-être, à certaines
personnes de l'entourage royal ou des plus hautes sphères
de l'Etat. Ces derniers, particulièrement Louis XIV et
Beauvillier, devaient agréer le travail de l'intendant,
avant que celui-ci ne puisse envisager toute démarche en
vue d'une éventuelle diffusion. Utilisant les quatre secrétaires
en titre de son administration et leurs subalternes administratifs
(les copistes), Basville fit donc réaliser, vers 1698 (ou
1699), un nombre précis de copies de son ouvrage qu'il
fit relier et qu'il adressa ensuite à ces hauts personnages
du royaume. Son Mémoire, remarquablement documenté,
étant agréé par ces derniers, l'intendant
ne pouvait qu'être tenté, pour l'efficacité
de son administration et pour mieux asseoir son autorité
- une autorité désormais auréolée
du prestige de l'agrément royal -, de faire réaliser
d'autres copies, sans doute destinées à certains
subdélégués ou hauts fonctionnaires de la
province de Languedoc. Il put également en offrir quelques-uns
à de hauts notables provinciaux, comme ce fut le cas du
manuscrit 8155 de la Bibliothèque nationale qu'il donna
en 1705 au comte de Saint-Sernin (cf. Moreil, p. 28). C'est sans
doute là l'explication de l'existence d'autres exemplaires
manuscrits d'époque qui ont pu circuler de diverses manières,
durant les trois derniers siècles. Mais, mis à part
quelques dons d'exemplaires à une poignée de relations,
plus ou moins amicales (ou de membres de sa parenté), Basville
ne pouvait diffuser des manuscrits dans d'autres sphères
que celles de son administration : le livre " appartenant
" au roi ne pouvait être communiqué à
quiconque en dehors de l'administration royale et plus précisément
en dehors de l'administration de l'intendance languedocienne ;
cette communication restait forcément sous le contrôle
de l'auteur qui dirigeait ladite administration. Il paraît
d'ailleurs probable qu'un certain nombre de copies réalisées
pour l'intendant aient été perdues ou détruites
avec le temps, si l'on se fie à la liste, finalement pas
si élevée numériquement qu'on l'a prétendu,
de manuscrits connus du XVIIe siècle (d'autant que les
anciens détenteurs ou plutôt leurs descendants finirent
naturellement, peu à peu, par oublier ce qu'était
au juste ce document, souvent recopié sans le nom de Basville
sur la page de titre, ce qui le destinait à devenir de
moins en moins identifiable
). Les historiens ont également
noté que ces exemplaires manuscrits présentaient
des variantes parfois notables, non seulement entre eux, mais
aussi avec le texte imprimé de 1734. On a parlé
d' " humeur de copistes ". Il ne semble vraiment pas
crédible qu'un simple " secrétaire de base
", faisant fonction de copiste, ait pu se permettre de retoucher
de son propre chef le texte d'un grand commis de l'Etat, comme
l'était l'intendant du Languedoc. En revanche, dans un
manuscrit d'une telle ampleur, un " lapsus calami "
ou un bourdon est forcément inévitable dans certains
exemplaires et, avec la fatigue au fil des pages, ne peut, dans
certains cas, qu'être suivi d'autres
Il est également
évident que la réalisation des manuscrits par les
copistes a pris un certain temps ; en conséquence, il serait
possible que Basville, si méticuleux, ait voulu apporter
quelques corrections ponctuelles aux derniers exemplaires copiés
à sa demande. Par ailleurs, nous avons comparé le
texte de notre manuscrit avec celui du livre imprimé de
1734 : il est évident que, dans ce dernier, on a, par-ci
par-là, remplacé un mot par un autre, sans toucher
au sens du texte, en vue d'en améliorer le style et la
qualité littéraire ; ceci pourrait bien ne pas être
le fait de l'auteur, décédé depuis dix ans,
mais du libraire qui assura l'édition. Ce dernier est sans
doute aussi à l'origine du changement de titre, celui de
la publication imprimée - plus " commercial "
- n'étant pas tout à fait conforme à l'esprit
du texte, puisque l'auteur n'a naturellement pas cherché
à faire un travail purement historique. Point très
important, les historiens ont également fait remarquer
que, comme nous l'avons vu, quelques manuscrits étaient
bien plus complets que d'autres, puisqu'ils comportent des tableaux
statistiques, absents de la plupart des exemplaires. Bien sûr,
en dehors de manuscrits contenant une version préparatoire
et inachevée du mémoire, on pourrait admettre que
certains secrétaires-copistes aient oublié de recopier
quelques-uns de ces tableaux qui étaient si grands qu'il
fallait nécessairement en faire des dépliants hors
texte et, par conséquent, les copier à part du texte
proprement dit du mémoire... Mais l'examen de notre exemplaire
nous amène à émettre une autre hypothèse
En effet, en nous déplaçant pour examiner notre
volume sous une source de lumière plus nette, le changement
d'éclairage nous a fait apparaître que tous les feuillets
du livre avaient primitivement été pliés
verticalement en deux, de manière souple (un peu comme
on le faisait alors pour les documents juridiques), avant que
ne soit réalisée la reliure. Nous n'avons pas lu
cette remarque au sujet des manuscrits évoqués par
les historiens, mais il est vrai que ces plis sont peu visibles.
Il paraît donc évident que les divers cahiers du
livre manuscrit étaient pliés de cette manière,
au fur et à mesure qu'ils étaient recopiés,
en vue d'être entassés en liasse (une ou plusieurs
par volume) et expédiés à ceux qui en étaient
destinataires, lesquels pouvaient ensuite les faire relier. Le
tout étant en feuilles volantes, on comprend bien que,
dans certains cas, des parties aient pu être perdues, en
particulier des tableaux statistiques qu'on avait peut-être
sortis de leur liasse pour s'en servir et qu'on avait pu oublier
de remettre en place ensuite
Liste des 5 tableaux statistiques qu'il contient (sur le premier
manuscrit : Etats du Languedoc)
I. Feuille dépliante " Carte contenant le nombre d'Ecclésiastiques,
la quantité des maisons Religieuses et Conventz de plusieurs
ordres, et le nombre des Religieux qu'ilz Contiennent dans la
Province de Languedoc " : classement croisé par diocèse
et par ordre religieux.
II. Feuille dépliante " Carte concernant les Conventz
des filles et le nombre des filles qu'ilz Contiennent dans la
province de Languedoc " : classement croisé par diocèse
et par ordre religieux.
III- Feuille dépliante :Tableau sans titre donnant la liste
des diocèses avec les noms des archevêques ou évêques
en exercice, les montants des revenus de chaque diocèse,
le nombre de ses paroisses et la date la plus ancienne attestée
dans son histoire.
IV- Feuille dépliante : Tableau sans titre présentant
les noms du Gouverneur et des " Lieutenans generaux avec
leurs Departemens "
V- " Estat du Produit du Commerce au dedans de la Province,
tant des Recoltes que des Manufactures qui y sont establies, et
Estat des Marchandises et denrées quy en sortent "
Principales références : - Edition originale imprimée
de 1734 du Mémoire de BASVILLE (cf. références
précises dans le chapeau, placé en tête de
la présente expertise). - Françoise MOREIL, L'intendance
du Languedoc à la fin du XVIIe siècle, édition
critique du " mémoire pour l'instruction du duc de
Bourgogne " (thèse de troisième cycle), Paris,
CTHS, 1985. - Antoine de FALGUEROLLES, de l'Université
Paul Sabatier (Toulouse), Basville statisticien solitaire du Languedoc,
article sur internet : www.lsp.ups-tlse.fr/Fp/Falguerolles/ -
Courrier de Madame Vivienne Miguet, conservateur général
des Archives départementales de l'Hérault, en date
du 29 mars 2013, donnant une description de l'exemplaire du manuscrit
qui est actuellement conservé dans ce service sous la cote
1 J 1303.
2- Mémoire sur
la province de Lyon, par Lambert d'Herbigny
176ff + 31 ff blancs
Le mémoire de Lambert d'Herbigny répond à
la célèbre enquête de 1697 pour l'instruction
du Dauphin, demandée par le duc de Beauvillier. L'objectif
était de présenter au duc de Bourgogne un tableau
du royaume, dans le droit fil des recommandations de Fénelon
et de l'abbé de Fleury dans leur plan d'éducation.
Le mémoire original, vraisemblablement gardé par
son auteur, n'a pas été retrouvé. De nombreuses
copies circulèrent rapidement. L'édition critique
(CTHS, 1992) en recense 74.
La généralité de Lyon se composait du Lyonnais,
du Beaujolais et du Forez ; ce mémoire, rédigé
en 1698 par ordre du Duc de Bourgogne, est très curieux
et d'un grand intérêt : Il offre une foule de détails
sur l'état civil, ecclésiastique, militaire judiciaire
et financier de la généralité. On y trouve
la liste des nobles et des terres titrées, avec le nom
des possesseurs, des renseignements utiles sur l'histoire de la
province, sur les statistiques, les murs des habitants,
le commerce et l'industrie, et en particulier de la soie.
Bibliographie : Le questionnaire de Lambert d'Herbigny, intendant
du Lyonnais (1697), Guy de Neufbourg, M. Gonon, Revue d'Histoire
Moderne & Contemporaine Année 1956 3-2 pp. 138-155.
3- Mémoire sur
la province de Dauphiné, par Etienne-Jean Bouchu
194ff + 27ff blancs
Etienne-Jean Bouchu, maître des requêtes (1685), intendant
du Dauphiné (de 1686 à 1705), conseiller d'État.
Fils d'un ancien intendant de Bourgogne, il eut à régler
dès son arrivée dans la province en 1686 un conflit
avec le Parlement sur la question du règlement des dettes
des communautés, en même temps qu'il était
confronté à celle des nouveaux convertis et des
nombreux religionnaires fugitifs. Dans les années qui suivirent,
il fut chargé de l'intendance des armées pendant
les guerres de la ligue d'Augsbourg et de Succession d'Espagne,
avant de s'attacher entre 1697 et 1706 au vaste travail de révision
des feux de la province, jamais réalisé depuis la
mise en place de la réalité des tailles en 1634
et 1639. Si cette dernière enquête l'accapara grandement,
son expérience administrative était néanmoins
une garantie de qualité pour le mémoire rédigé
en 1698. Contient une intéressante chronologie des comtes
de Valentinois comparée aux généalogies suivant
Chorier et Allard
4- Mémoire sur
la province de Provence, par Pierre-Cardin Le Bret
158ff + 58ff blancs
Pierre-Cardin Le Bret, seigneur de Flacourt et de Pantin, né
à Paris vers 1640 et décédé à
Aix-en-Provence le 25 février 1710 (enseveli le lendemain
à la Madeleine), est un parlementaire aixois des XVIIe
et XVIIIe siècles. Pierre-Cardin fut successivement conseiller
au grand conseil (1668), maître des requêtes (1676),
intendant du Limousin (1681), du Dauphiné (1683), du Lyonnais
(1686), et de Provence (1687-1704). Il fut reçu premier
Président du Parlement d'Aix, le 8 octobre 1691. Il exerça
la première présidence jusqu'à sa mort,
survenu en 1710.
Nous trouvons très peu de ces manuscrits sur la Provence
dans les fonds publics mais aucun à la BNF : Médiathèque
Ceccano. Avignon, (cote 591-1500) ; Mazzarine : Ms 3220-3221 ;
Aix, Méjanes 1-1229 ; Arles médiathèque :
1-425 ; Epinal : 1-204 ; Valenciennes, BM, avec le Dauphiné
: 1-1057 ; Toulon (Généralité de France par
Lebret).
CONCLUSION
Ce manuscrit ou plutôt ces 4 manuscrits sont tout à fait exceptionnels par la richesse unique de ce contenu
conservé dans un très bel état. C'est un
document du plus haut intérêt, à la fois sur
le plan régional (le quart sud-Est de la France !) et national
: c'est là une pièce d'archives telle qu'on n'en
voit peu circuler. Il n'en existe aucune copie en France dans
tous les fonds publics, y compris à la BNF, qui regroupent
ces 4 mémoires. Le contenu est quasiment identique aux
textes manuscrits que nous avons pu consulter mais qui chaque
fois ne sont que sur une région (dans le meilleur des cas
nous avons trouvé un mémoire qui comporte 2 régions
: Dauphiné et Provence à Valenciennes). Ce n'est
pas une vulgaire copie tardive et incomplète qui est ici
proposée aux amateurs, mais une pièce quasi unique,
digne des plus grands dépôts d'archives. La dernière
date notée sur les renseignements du manuscrit est 1698
voire 1699, date à laquelle nous situons la rédaction
de ces 4 recueils.
Prix sur demande
Planches dépliantes pour le premier mémoire concernant le LANGUEDOC